Le comportement alimentaire du cueilleur est celui qui correspond le mieux à la physiologie humaine. Il ne permet pas de répondre à toutes les situations socioculturelles, affectives ou professionnelles que nous sommes amenés à rencontrer à notre époque, mais il constitue un outil majeur de la boîte à outils d’un aspirant crudivore. C’est la raison pour laquelle il est important de décrire de façon détaillée comment se déroule la journée type d’un cueilleur.
Le cueilleur mange cru entre 4 et 6 fois par jour.
Chaque prise alimentaire est constituée d’un seul aliment consommé en plus ou moins grande quantité suivant les besoins de l’organisme.
Dans la journée, vous allez devoir visiter les permanents par deux fois, les saisonniers par deux fois aussi et les aléatoires seulement une fois.
Cette feuille de route journalière est indicative et pourra être perturbée de temps à autre.
Une sixième prise alimentaire, dite d’ajustement, n’est pas obligatoire.
Elle s’avère néanmoins nécessaire lorsque les quantités ingérées dans la journée ont été trop faibles. Elle s’avère aussi salvatrice lorsque vous aurez manqué votre cible une ou plusieurs fois dans la journée. Manquer sa cible signifie que vous avez consommé un aliment qui vous aura laissé sur votre faim. Il faut entendre par là que, même le ventre plein, vous aurez encore une sensation de faim ou d’insatisfaction au lieu de l’état de sérénité sensorielle attendu. La gestion de cette prise alimentaire est abordée plus loin.
Première prise alimentaire
Quelle heure ?
L’heure de la première PA de la journée dépend de la dernière PA de la veille au soir.
Plus elle aura été compliquée :
- et plus votre organisme prendra du temps pour vider les poubelles le lendemain matin [1] ;
- et plus le jeûne nocturne naturel se prolongera parfois tard dans la journée.
Entre deux heures et trois heures après le réveil est une bonne moyenne :
- moins de deux heures, c’est que vous n’avez pas suffisamment mangé la veille ;
- plus de quatre heures, c’est que vous avez trop ou trop mal mangé la veille.
Le jeûne intermittent est une bonne réponse à une mauvaise pratique alimentaire car jeûner ne règle pas le problème de fond [2] .
Quelle catégorie ?
Votre jeu comprend cinq cartes : 2 Permanents, 2 Saisonniers, 1 Aléatoire.
Bien que l’on puisse exceptionnellement consommer des aliments de toutes les catégories (permanents, saisonniers et aléatoires), deux raisons incitent à privilégier les permanents pour cette première prise alimentaire :
- la grande disponibilité naturelle de cette catégorie (toute l’année) ;
- et l’avantage qu’offre l’appétence élevée de la première PA suite à un jeûne nocturne accompli (ayant laissé le temps aux éboueurs de votre intestin de faire leur travail de nettoyage).
L’objectif est de faciliter la consommation d’aliments dotés d’appels sensoriels faibles, tels que les légumes (permanents).
Vous avez chez vous 4 ou 5 légumes. Moins, c’est dommage pour vous (trop peu) et plus, c’est inutile (il vaut mieux renouveler régulièrement sa plage alimentaire [3] ).
- 1) Procédez à une évaluation olfactive afin d’identifier le ou les permanents les plus attirants.
- 2) Si plusieurs d’entre eux vous attirent, procédez au flairage alternatif [4] pour faire émerger le gagnant.
- 3) Si aucun d’entre eux ne vous attire, plutôt que vous précipiter vers la crusine ou la cuisine, procédez à un goûter/cracher [5] afin d’identifier le plus intéressant.
- 4) Si le goûter/cracher ne vous révèle aucun aliment agréable au goût, il ne vous reste plus qu’à explorer une autre catégorie alimentaire.
Conseils de consommation
Si l’aliment est nouveau ou inhabituel pour vous, ne commencez pas par une énorme bouchée, goûtez d’abord une petite quantité. Vous ne pouvez pas savoir à priori combien vous allez devoir en consommer pour couvrir vos besoins. Si vous les dépassez largement dès la première bouchée, vous allez subir un arrêt sensoriel qui peut être très violent.
N’oubliez pas que l’intensité d’une odeur, sa force, n’a pas plus de valeur que des effluves subtiles mais enchanteresses.
La prise alimentaire sensorielle en elle-même réclame votre présence totale. C’est une histoire « d’amour physiologique » qui se passe entre vous et ce que vous consommez ; si votre attention est captée par une discussion ou toute autre raison, vous aurez de fortes chances de manquer un arrêt sensoriel. Manger trop d’un aliment n’est pas mieux que ne pas en manger suffisamment.
Deux types d’arrêts sensoriels peuvent survenir :
- ceux qui concernent la perception en bouche : baisse de goût, apparition d’un mauvais goût ; ou si la structure devient désagréable : trop sec, pâteux, manque de salive, si vous devez boire, etc. ;
- ceux qui concernent les manifestations corporelles : ventre plein, gargouillis désagréables, frissons, éternuements, morsure de la langue, saignement de la langue (ananas), etc.
Il est important d’apprendre à repérer les premiers signes d’arrêt sensoriel pour interrompre votre prise alimentaire au bon moment. Si vous ne le faites pas, d’autres arrêts sensoriels plus puissants vont se manifester jusqu’à ce que vous vous rendiez à l’évidence : vous avez consommé suffisamment de cet aliment.
Au début, vous pourrez vous faire piéger parce que vous aurez envie de savoir à quoi ressemblent les arrêts sensoriels de tous les aliments. Alors, vous dépasserez probablement les premiers signaux, les plus subtils, ce qui vous exposera à des réactions parfois très désagréables, mais c’est un apprentissage qui vous permettra ultérieurement d’être d’une précision absolue.
Il est très important de prendre la mesure de la quantité consommée lors d’une prise alimentaire, car cela détermine le temps que vous allez devoir attendre avant de pouvoir à nouveau manger. Suivant la quantité que vous aurez consommée (six bananes ou une demi-gousse d’ail), vous ne ressentirez pas la même chose. Si vous êtes calé sur le rythme classique de deux repas par jour, votre organisme va vous flageller lorsque vous sortirez de table avec juste un bout d’ail pour tenir jusqu’au soir. Et ce, à juste titre, car la réaction est normale. Mais si vous intégrez que vous pouvez manger quand vous le souhaitez, que quinze minutes après votre ail, vous allez pouvoir consommer autre chose, tout ira bien.
N’oubliez pas non plus que des quantités très faibles de certains aliments (ail, par exemple) peuvent être indispensables pour lancer des réactions biochimiques (catalyseur) physiologiquement très importantes. Il ne faut donc surtout pas les négliger. Il faudrait même les rechercher en permanence et en tester un maximum dans l’espoir de tomber sur une perle olfactive. Ainsi, vous comblerez une multitude de micro-besoins qui, sans cela, pourraient rester inassouvis pendant des décennies.
Testez à l’odeur tout d’abord, puis au goût lorsque cette odeur est attirante, et allez-y sur la pointe des pieds, surtout quand vous ne connaissez pas l’aliment, car vos besoins peuvent être infimes et la sanction brutale.
Fin de la prise alimentaire
Vous avez donc repéré une baisse de goût et vous avez stoppé votre PA.
Il est possible que vous ayez consommé cinq carottes, ou quelques feuilles de salade, voire encore une demi-gousse d’ail. Vous serez probablement comblé par vos carottes, mais manger quelques feuilles de salade ou une demi-gousse d’ail risque de vous « laisser sur votre faim ».
Deuxième prise alimentaire
Revenons à notre première PA : vous avez mangé cinq carottes et vous vous êtes régalé. Logiquement, si vous n’avez pas manqué votre cible en choisissant la carotte, vous devriez vous sentir dans un état de sérénité sensorielle qui vous laissera tranquille pendant un certain temps. Peut-être une demi-heure, peut-être deux heures. Si vous aviez mangé cinq grosses mangues ou un demi-kilo de viande, cet état devrait durer de 3 à 4 heures, voire plus pour des prises alimentaires exceptionnellement importantes. Cela peut se produire en début de transition alimentaire ou en cas de pathologie, ou encore lorsque le terrain est très dégradé.
Quelle catégorie ?
Vous avez visité les permanents en première PA, il vous reste donc 4 catégories à visiter : encore un permanent, un saisonnier de courte durée (fruit frais), un saisonnier de longue durée (fruits à coque) et un aléatoire (sucres concentrés ou protéines animales terrestres ou protéines animales aquatiques).
Si vous vous êtes levé à 8 h et que vous avez mangé une première fois vers 10 h, il est donc environ midi, une heure chaude tout à fait propice à une prise alimentaire de fruits frais [6] .
Troisième prise alimentaire
Quelle catégorie ?
Votre jeu ne comprend plus que trois cartes :
- 1 permanent, 1 saisonnier et 1 aléatoire ;
- ou 2 saisonniers et 1 aléatoire.
Quatrième prise alimentaire
Quelle catégorie ?
Votre jeu ne comprend plus que deux cartes : soit un permanent et un saisonnier, soit un permanent et un aléatoire.
Si vous avez choisi un aléatoire sucre concentré en deuxième ou en troisième PA, vous n’avez plus le choix qu’entre un permanent et un saisonnier et il vous faudra éviter un aléatoire protéiné pour votre cinquième PA.
Le rapprochement de ces deux catégories engendre des problèmes de digestion induits par les molécules de Maillard que produisent les sucres au contact des protéines (même à la température du corps).
Si vous avez choisi un permanent en quatrième PA, pour votre cinquième, vous aurez le choix entre les différents aléatoires.
Cinquième prise alimentaire
Quelle catégorie ?
Un aléatoire ou un permanent.
Sixième prise alimentaire : une variable d’ajustement
La prise alimentaire d’ajustement [7] est optionnelle.
Sa fréquence pourra être très variable. Il n’y a ni règle, ni fatalité et tout le monde peut s’améliorer.
Elle pourra être constituée d’aliments crus, plus ou moins mélangés et/ou arrangés, ou d’aliments plus ou moins transformés.
Elle peut servir de variable d’ajustement physiologique ou psychologique.
Conclusion
La journée type d’un cueilleur qui vient d’être décrite n’a pas pour vocation d’être appliquée à la lettre. Elle constitue un cadre indicatif tolérant diverses transgressions qui ne devront en aucun cas se transformer en règles.
Les effets de ce mode alimentaire sur la santé sont incroyablement rapides, il n’est pas nécessaire d’attendre plusieurs semaines pour les mesurer. Une ou deux journées bien conduites permettent d’en ressentir les bienfaits.
La connaissance du mode alimentaire du cueilleur permet de disposer en permanence d’un jeu de voiles neuf pour faire voguer le bateau de votre santé, et donc aussi celui de votre vie, sur un océan quelque peu perturbé par le paradigme culinaire.
Alors, bon vent à tous ! ! !
Dominique Guyaux
[1] Voir « Révélations sur le début de la faim »
[2] Voir « Révélations sur le jeûne »
[3] Voir « Révélations sur la gestion de la plage alimentaire d’un crudivore »
[4] Le flairage alternatif est une technique qui permet de départager deux aliments en compétition.
[5] Voir « Révélations sur le goût »
[6] Voir « Révélation sur le froid des sucres… »
[7] Voir l’article à venir sur les « Révélations sur la prise alimentaire d’ajustement »
5 Responses
Un Grand Merci à toi Dominique !!! 😅
Merci pour ces révélations de la journée de cueilleur au XXI siècle, très intéressantes .
Merci Dominique pour ces précisions, ça peut être bien utile ! C’est important d’avoir bien digéré ses aliments avant la prise alimentaire suivante.
Merci Dominique, pour ce viatique et pour tout ce que tu partages !
🙂